Critique sociale et justice, par Alex Demirović
Si la particularité de l’approche marxienne de la critique de l’économie politique est d’évacuer tout motif moral pour justifier la nécessité de l’abolition du capitalisme, l’injustice reste un motif puissant de mobilisation sociale. Dans l’article qui clôture ce cahier, Alex Demirović relève les enjeux de classe qui traversent les discours théoriques et politiques sur la justice.
S’il est bien un frein et refrain de la critique sociale, c’est celui de la « justice », de crier à l’injustice et s’en insurger. Ce moteur de l’action des masses qui paraît infondable par-delà l’idéologie bourgeoise, nous laisse bien souvent dans l’expectative. Et avec raison, puisque paré de ses prétentions universalisantes, il cache bien mal son ancrage historique et social, celui-ci qui justement le transforme parfois en « arme de la critique dont les masses se saisissent » pour faire dérailler l’histoire de la voie tracée par les dominants. Pour ouvrir ces champs d’action et de réflexion, il est nécessaire de mettre à plat tous les enjeux que la notion de justice recouvre. C’est ce que nous propose Alex Demirović dans son article qui déploie son argumentation à travers différentes grandes figures incontournables de la théorie sociale, qu’elles soient libérales ou marxistes. Si la justice est un moment de la forme idéologique qu’est la morale, il ne paraît pas possible de renoncer à prendre position sur ce terrain sans se marginaliser, voire s’exclure, politiquement et moralement.
Paru dans le cahier numéro 3 de la revue (2023/2)