La Commune de Paris et le Capital de Marx

La Commune de Paris et le Capital de Marx, par Kenneth Hemmerechts & Nohemi Jocabeth Echeverría Vicente, paru dans le Cahier n° 4 de la revue (2023/3)

Le spectre de la Commune hante le Capital. Oui, mais de quelle manière ? C’est ce que Kenneth Hemmerechts & Nohemi Jocabeth Echeverría Vicente cherchent à explorer grâce à toute une série de documents qui nous sont à présent accessibles. Le lien qui apparaît entre le contexte socio-politique et l’élaboration du texte du Capital permet de redonner vie autant à l’origine qu’à la finalité politique.

Peu de livres d’économie politique sont devenus aussi influents que le livre I du Capital. Après que Karl Marx a publié, en 1867, le premier volume du Capital sur le mode de production capitaliste, le livre a été publié à nouveau en russe en 1872, dans une deuxième édition allemande en 1872-3 et en français – avec pour titre, Capital – en 1872-5. Le processus de publication de l’édition française a commencé en décembre 1871, au lendemain de la Commune de Paris. Cet article entend étudier les conditions qui ont conduit à ce que ce processus s’amorce. […] En examinant la Commune de Paris et ses conséquences, nous sommes mieux à même de comprendre les nouvelles possibilités qu’elle a créées pour la publication de l’œuvre de Marx en français, les liens qu’elle a facilités et la manière dont elle a façonné le processus de publication du Capital.

Cet article permet de réinscrire la production théorique de Marx dans une réalité sociale et politique dont elle est parfois abstraite. Les documents disponibles aujourd’hui à propos de ce processus (contrats, correspondances, etc.) permettent enfin de dessiner très précisément la manière dont on est parvenu à ce texte, notamment en France. La synthèse opérée dans l’article est unique et n’aurait avant aujourd’hui pas pu être d’une telle qualité sans les travaux de nombreux autres chercheuses et chercheurs. Les enjeux liés à la traduction française et au financement du projet d’édition se révèlent indissociables de la Commune et des communards. Comprendre Marx, c’est aussi comprendre son époque et c’est seulement ainsi que nous pouvons progresser dans la connaissance de nos réalités actuelles. Enfin, cette approche du texte permet surtout de le désacraliser, ce qui nous paraît être une étape essentielle dans la construction individuelle et collective d’un rapport critique au texte et à la lecture qu’on en fait.